Vous ne devinerez jamais la prémisse de Food Truck Simulator, un jeu de simulation où vous conduisez un camion-restaurant, y cuisinez et gérez l’entreprise. Vous l’avez dans le mille : vous venez d’hériter de ce camion et vous devez apprendre les ficelles du métier à partir de zéro. Ça vous dit quelque chose ? C’est pratiquement la même prémisse pour tous les jeux de simulation ces derniers temps. Regardez ici, ici ou ici par exemple.
Ceci dit, ces jeux n’ont pas l’habitude de se distinguer par leur narratif très complet et immersif, mais plutôt par les mécaniques qu’ils proposent et les défis auxquels ils soumettent les joueurs. Voyons ce que Food Truck Simulator a sous le capot.
- Studio de développement : DRAGO Entertainment
- Éditeur : DRAGO Entertainment, Movie Games S.A.
- Plateforme disponible : PC
- Plateforme de test : PC
- Date de sortie : 14 septembre 2022
- Classement : non disponible
- Prix : 22,79$ sur Steam
- Page Steam du jeu
Le studio qui nous avait livré un somme toute convainquant jeu de simulation de pompiste nous revient donc avec une nouvelle simulation au potentiel intéressant. Les camions de cuisine de rue font partie de l’imaginaire collectif de la société nord-américaine et occupent une place de choix dans les longs métrages, par exemple avec le titre Chef qui est carrément dédié à la forme culinaire.
Mais est-ce que la poursuite d’un certain réalisme, à tout le moins dans les graphiques et les mouvements du joueur, est une bonne idée pour un jeu essentiellement de cuisine ? Vous pourrez vous faire votre opinion alors que nous allons diviser le jeu en trois grands pans : la conduite du camion, la préparation de la nourriture et la gestion de l’entreprise.
La conduite
Après une brève introduction un tantinet larmoyante sur la reprise de l’entreprise du paternel – ce qui par ailleurs détonne étrangement avec le caractère festif de la nourriture de rue – on commence à préparer les prochains quarts de travail. On doit d’abord commander les ingrédients puis aller les chercher.
Première incursion, donc, dans le monde de la conduite des camions de nourriture de rue. La destination n’est pas très loin, un magasin géré par Carol, la bonne amie de notre père disparu – encore une référence au trépas – qui agit comme une forme de guide dans ce jeu. Il faut simplement amener le camion de bouffe de rue dans la zone indiquée.
Or, les contrôles sont immondes. Le camion est très peu réactif aux commandes, il ne tourne ou ne freine que de manière très difficile, rendant la conduite irritante. Encore pire, il ne semble pas y avoir vraiment de conséquence aux accidents de la route. Ainsi, tout le long du chemin, il sera possible d’emboutir voiture et poteaux sans conséquence pour le camion ou le permis de conduire du protagoniste.
Ce n’est pas tout ! Il y a même un succès (achievement) pour rouler sur un piéton ! Pourquoi un jeu qui se veut une simulation de gestion d’une entreprise de camion-restaurant récompense le joueur pour avoir non seulement transgressé le code de la sécurité routière, mais en plus pour l’avoir fait avec extrême préjudice pour un simple badaud ? C’est à n’y rien comprendre.
Nous voici donc dans une simulation où la conduite est désagréable au possible et où il n’y a aucun intérêt à même faire l’effort de s’améliorer. Heureusement, une fois l’épicerie faite, il ne nous reste qu’à trouver un endroit où installer notre véhicule et l’on pourra passer à l’étape suivante : la cuisine. Par trouver un endroit, j’entends aller là où le jeu nous indique de manière linéaire, surtout durant le très long tutoriel.
La cuisine
Nous arrivons enfin dans le vif du sujet. Si la conduite ne représente qu’une fraction du jeu – qui aurait par ailleurs pu n’être simplement qu’une cinématique sauf pour l’option d’écraser tous les passants disponibles – la préparation des repas se doit d’être au centre de l’aventure. Après tout, c’est l’intérêt de la chose.
Si lorsque je vous parle de jeux de cuisine, vous avez en tête des titres comme Overcooked ou PlateUp !, vous êtes à des années-lumière de Food Truck Simulator. Alors que les premiers exemples sont dynamiques, vivants et amusants tout en proposant un défi, Food Truck Simulator est l’inverse. Toutes les actions sont laborieuses, imprécises et à tout dire ennuyantes.
Pour ne pas mentir, j’avais l’impression que mon personnage se déplaçait dans le Jell-O à tel point qu’il me semblait qu’exécuter des choses aussi simples que déposer des contenants, couper une tomate ou assembler un burger était lassant. J’ai d’abord pensé que le jeu était destiné au VR et que c’était l’adaptation clavier-souris le problème. Que nenni ! Le jeu n’est pas offert en réalité virtuelle.
Et tout cela alors que les chronos se multiplient autour du joueur. Il y a le temps global à traiter une commande – différente par client et non pas selon le contenu de la commande, un autre irritant aléatoirement disposé dans le jeu -, mais également les cuissons et même les péremptions, qui peuvent survenir plus rapidement que ce que l’on pourrait anticiper.
Que l’on soit clair, je n’ai aucun problème avec les jeux de ce type qui exercent de la pression sur les joueurs, mais dans Food Truck Simulator, j’ai trouvé que le jeu mettait différentes pressions parfois aléatoirement sans donner des outils aux joueurs pour s’aider. Une préparation anticipée des aliments, comme couper les tomates à l’avance ? Oubliez cela. Des minuteurs pour la cuisson ? Du balai, hérétique ! Des rappels sonores, des indices pour les éléments à ne pas oublier ? Pas ici, mon ami.
Et tout cela aurait pu être passablement excusé si au moins les plats concoctés avaient l’air délicieux, s’il y avait au moins un sens du devoir accompli. Mais pour tout dire, les résultats sont moches et répétitifs. Je comprends les clients de ne pas sauter de joie à la vue de leurs sacs en papier graisseux.
La gestion d’entreprise
Nous avons déjà parlé de la question des commandes de nourriture pour la mission à venir, nous pouvons ajouter à cela la gestion des invendus qui finiront éventuellement à la poubelle. Par ailleurs, en bon gestionnaire, vous pourriez vouloir n’acheter que le strict minimum et, pourquoi pas, prendre le risque d’en manquer. Mais dans Food Truck Simulator, les achats se font en paquet de quatre. Si vous pensez avoir besoin de trois tomates pour la prochaine mission, en voici quatre. Besoin de cinq ? En voici huit. La balance finira au rebut, avec votre enthousiasme à gérer un camion restaurant.
En dehors de cela, il sera possible d’ajouter des appareils de cuisine à votre camion de nourriture de rue. Le tout est assez linéaire, les besoins pour chaque mission demandant des équipements supplémentaires, vous n’avez essentiellement qu’à suivre la demande et ajouter les items nécessaires.
Puis finalement, il sera possible de décorer le camion à votre goût, selon des autocollants débloqués au travers des missions et des jauges de couleur. Cette portion est très bien, il y a matière à avoir un camion avec un peu de personnalité et à s’amuser à le changer entre les missions.
Une ambiance glauque
Au final, les jeux de cuisine doivent être des occasions festives qui célèbrent la nourriture. S’il y a des chronomètres un peu partout, ceux-ci doivent créer de l’enthousiasme et non pas de l’anxiété et le jeu doit proposer des solutions diversifiées aux problèmes rencontrés plutôt qu’une linéarité blasante et gélatineuse. Plus que tout, à la fin d’un service dans un jeu de cuisine, l’on doit être content des commandes remplies et des bons petits plats à l’apparence savoureuse qui auront donné faim au joueur en chair et en os (et en estomac).
Vous le comprendrez, Food Truck Simulator ne coche à peu près aucune case. C’est dommage, puisque l’idée à la base, celle du camion-restaurant, a beaucoup de potentiel. C’est dans l’exécution que cela devient fatal. La conduite est difficile et parfaitement inutile, elle n’a ni d’enjeu ni d’intérêt et donne l’impression de perdre son temps. La cuisine désagréable et moche n’apporte aucun plaisir. La gestion d’entreprise limitée et linéaire semble une autre perte de temps. Par moment, je me suis demandé si les développeurs ne cultivaient pas secrètement un dédain pour la bouffe de rue.
S’il y a encore place à l’amélioration, il faudrait d’abord revoir la conduite pour la rendre plus fluide et donner des objectifs (et des récompenses) avec une conduite sécuritaire, réaliste, mais tout de même rapide, efficace et remplie de défis. La cuisine devrait être dynamique, rapide et avoir plusieurs options pour atteindre les objectifs. Surtout, les résultats finaux devraient donner l’eau à la bouche. Finalement, la gestion d’entreprise doit être complètement revue. Ce sont des camions de nourriture de rue, après tout ! Donnez-nous des options d’en faire de cuisine mexicaine, de restauration rapide, de kebabs ou encore de cuisine asiatique plutôt que de forcer une seule voie et, pire, d’essayer d’intégrer plusieurs genres. Laissons de la place à la créativité des joueurs, évitons la linéarité.
Tant que ce jeu n’aura pas reçu une mise à jour majeure qui offrira oxygène et possibilités aux joueurs, je vous conseille de sauver 20$ et de continuer de chercher un titre qui en vaudra la peine.
J’aime
- La thématique du camion-restaurant
- Les options de personnalisation du camion
- La radio dans la cuisine qui est la seule source de plaisir de cette phase
J’aime moins
- Scénario prévisible et sans saveur
- Conduite désagréable, fade et sans défi
- Cuisine déplaisante, amère et redondante
- Gestion d’entreprise linéaire et superflue
- Ambiance glauque et déprimante
- Nourriture abjecte
La copie de Food Truck Simulator a été fournie par DRAGO Entertainment.
Food Truck Simulator
Scénario
Graphisme
Bande sonore
Jouabilité
Durée de vie
On va prendre la livraison à domicile
Le concept est génial : vous cherchez à faire fortune en gérant un camion-restaurant. Vous devrez le conduire à différents endroits de la ville, concocter de bons plats pour vos clients gourmets puis prendre des décisions quant à l’avenir de votre entreprise. Dans l’exécution, c’est raté. L’ambiance est déprimante et les actions à poser sont absurdement complexes et lentes, sans qu’il n’y ait une once de plaisir, et cela, dans pratiquement tous les aspects. Faites-vous livrer un bon jeu et sauvez quelques minutes de votre existence ainsi.