Vous connaissez sûrement déjà Codenames, le jeu populaire des auteurs Scot Eaton et Vlaada Chvátil (Galaxy Trucker). Ce jeu où un Maître-Espion doit faire deviner des Noms de Code à son équipe a aussi sa version Images à laquelle j’ai beaucoup joué. Codenames et Codenames Images sont des favoris dans mon entourage, mais comme on ne peut y jouer à deux joueurs (on peut, mais c’est moins amusant), cela me manquait de pouvoir y jouer plus souvent. C’est pourquoi j’avais très hâte d’essayer enfin Codenames Duo. Voici ma critique dans laquelle vous découvrirez si vous ajouterez ce jeu à votre liste de souhaits, et en quoi il est différent de Codenames.
- Auteurs : Vlaada Chvátil, Scot Eaton
- Illustrateur : Tomáš Kučerovský
- Éditeur : IELLO
- Nombre de joueurs : 2+
- Durée : 15 min
- Année : 2017
- Prix : 29.99$
- Page officielle du jeu
- Page BoardGameGeek
Concept de la série Codenames
En quelques mots, une petite présentation de la série pour ceux qui ne la connaissent pas. Codenames et Codenames Images se jouent de deux à huit joueurs, théoriquement, mais ne sont à leur meilleur qu’à partir de quatre et idéalement six à huit joueurs. Deux équipes s’affrontent et dans chacune, un Maître-Espion donne des indices afin de faire deviner des Noms de Code parmi 25 cartes visibles à tous (mots ou images selon la version du jeu). Le Maître-Espion sait où se trouvent les Noms de Code de son équipe à l’aide d’une carte Clé. Il doit alors donner à son équipe un mot et un chiffre, représentant l’indice et le nombre de Noms de Code y étant associés. Mais attention, si l’équipe pointe l’Assassin plutôt qu’un Nom de Code ou un Témoin (mot Neutre dans Codenames Duo), elle a automatiquement perdu. Le Maître-Espion doit donc user d’imagination pour donner un indice précis lié au plus grand nombre de Noms de Code possible, tout en évitant soigneusement l’Assassin.
En quoi Codenames Duo est différent ?
Codenames Duo est la version coopérative du jeu. Oui, le nom mentionne qu’elle est axée à deux joueurs, mais une variante permet d’y jouer à plusieurs. Comme je ne l’ai pas essayée, je vais concentrer ma critique sur le jeu en duo.
La particularité de la version Duo est que l’on joue les deux rôles : on donne des indices, en plus de (tenter de) deviner. J’y reviendrai pour une comparaison avec Codenames un peu plus loin dans cet article. Un tour est constitué d’un indice et d’au moins un Nom de Code trouvé. On utilise un jeton Temps à la fin d’un tour, soit côté Affaire classée si on a deviné au moins un nom de code, soit côté Témoin Innocent si on a pointé un mot Neutre. Pour une partie classique, on a au total quinze Noms de Code à deviner (neuf par joueurs dont trois en commun), et neuf tours pour y arriver (neuf jetons Temps). Évidemment, si on pointe l’Assassin, la partie se termine et c’est la défaite.
Comme deux joueurs donnent des indices sur le même plateau de jeu (25 mots), les possibilités sont plus grandes et on a moins l’impression de « bloquer » que dans Codenames. Dans ce dernier, quand on est Maître-Espion et qu’on ne trouve pas de bon lien entre nos noms de codes, la partie risque d’être longue et on n’a personne pour nous aider. Dans Duo, au pire, on donne un indice en lien avec un seul nom de code, notre équipe le devine fort probablement, puis c’est au tour de l’autre joueur. Oui, on utilise un jeton temps, mais il ne faut pas sous-estimer cette stratégie car parfois, vaut mieux jouer de façon prudente et laisser l’autre joueur éliminer quelques cartes du plateau avec un meilleur indice.
Codenames Duo, est-ce que c’est amusant ?
Je vous avouerais que j’ai peine à retenir mon enthousiasme : Codenames Duo est un jeu que j’ai tant attendu, et je n’ai pas été déçue. Ce jeu nous fait réfléchir autrement, il fait appel à notre imagination et nous fait utiliser notre vocabulaire. Il faut vraiment réfléchir à tous les sens de chacun des mots, chercher des liens, c’est un passionnant mélange de créativité et de vocabulaire, mais c’est accessible à tous.
Les gens qui n’aiment habituellement pas les jeux de mots ou les jeux où on fait deviner quelque chose vont aimer Codenames Duo, c’est presque assuré.
Évidemment, dans un jeu de déduction, tout dépend de l’attitude. Il faut garder en tête qu’il y a différentes façons de penser et c’est précisément en n’oubliant jamais ce point que l’on deviendra meilleur à ce jeu.
La satisfaction de trouver de bons liens et la discussion qui suit la partie pour expliquer nos hésitations est sans aucun doute le meilleur côté des jeux de la série. Lorsqu’on fait une bonne partie, ça favorise la complicité. Tout le long de la partie, on pense à autre chose qu’à notre quotidien, car on doit se creuser la tête, mais pas d’une façon épuisante.
Il est difficile de rester neutre en cours de partie, de ne pas s’exprimer et ne pas faire de blagues, mais c’est important pour que la partie se déroule sans tricherie. Tout comme dans une partie de Mysterium où la personne qui incarne le fantôme (donneur d’indices) doit se faire très discrète.
Évidemment, c’est un jeu où connaître son partenaire est un atout, car on connaît les sujets d’intérêts de l’autre, ses forces et ses faiblesses niveau connaissances générales. On peut axer nos indices en fonction de ce que l’autre sait ou ce à quoi il risque de penser en premier, teinté par ses intérêts.
Matériel et règles
Comme dans Codenames, les mots sur les cartes sont d’un côté sur fond blanc (par exemple, vers l’autre joueur) et l’autre côté sur fond beige (par exemple, vers vous) . Nous avions le réflexe de lire à l’envers le texte sur fond blanc car il est plus gros et en gras. C’est probablement dû au fait qu’on est habitués de lire à l’envers quand on explique un jeu et que l’on place le matériel face aux nouveaux joueurs et à l’envers pour nous.
Les mots utilisés sont simples (Aventure, Dauphin, Épée, etc.), malgré que quelques-uns pourraient devoir être expliqués à des plus jeunes ou mêmes à certains adultes, par exemple Curry, Kilt, Châtaigne.
La partie « score » du jeu n’a pas eu un grand intérêt pour nous, puisque l’issue de la partie, victoire ou défaite, ainsi que les bons ou moins bons indices qui nous y ont menés sont déjà une évaluation de la partie en soi. On a du plaisir sans compter les points et comme il s’agit d’un jeu coopératif, on gagne ou on ne gagne pas.
Les tuiles Identité, elles, ont de belles illustrations qui font vraiment espions, et en plus, on croirait vraiment reconnaître quelques acteurs et actrices. C’est probablement voulu tellement c’est flagrant.
Les règles sont bien rédigées, il n’y a pas de fautes, je le souligne car j’en trouve souvent dans des règles traduites. Elles sont également bien illustrées et claires. C’est toujours bien d’avoir une illustration de la mise en place, on sait en un coup d’oeil où s’asseoir autour de la table et comment placer le matériel avant de débuter les explications et la partie.
Il y a beaucoup moins de termes différents dans les règles de Codenames Duo que dans Codenames, où on s’y perdait dans la thématique espions (Maître-Espion, Agents, Informateurs, Témoins, Agent Double). Le langage utilisé dans Codenames Duo est plus intuitif et on n’accroche pas sur les termes ce qui accélère l’apprentissage du jeu.
Durée et difficulté d’une partie
En général, j’ai toujours trouvé que la durée d’une partie indiquée sur une boîte de jeu est à titre indicatif, car celle-ci peut varier beaucoup selon le groupe de joueurs. Sur cette boîte, il est indiqué 15 minutes, et nous (deux joueurs expérimentés ayant déjà joué à Codenames) avons joué des parties d’une moyenne de 40 minutes. Nous aurions pu jouer plus rapidement, mais nous aurions probablement perdu ! Au premier tour, c’est le premier joueur à trouver son indice qui se lance. Ainsi, la partie n’est pas trop longue à débuter. Toutefois, j’ai quand même remarqué que le premier tour est plus long car on apprend nos mots, on doit réfléchir à l’ensemble des 25 cartes pour trouver nos indices. On a facilement passé un bon cinq minutes à chacune des parties avant de donner notre premier indice.
Cartes Mission
Une fois que l’on a gagné une partie en mode Mission standard, il est recommandé d’essayer les cartes Mission. Celles-ci font varier un peu la difficulté de la partie et donc les stratégies qui devront être utilisées pour gagner. On devra donc jouer plus risqué ou plus prudemment selon le cas. Sur les cartes Mission, il faut suivre un trajet de ville en ville et chacune a une combinaison de deux chiffres, par exemple 9-5 (neuf tours, cinq erreurs acceptables). Au-delà du nombre d’erreurs acceptables, on doit utiliser deux jetons Temps par erreur.
Avant cette critique, nous avons joué cinq parties dont voici les résultats :
- 1re partie : Mission standard réussie 7/10
- 2e partie : Mission standard réussie 8/10
- 3e partie : Mission 9-5 réussie
- 4e partie : Mission 11-2 réussie
- 5e partie : Mission 11-0 échouée (de peu !)
Quelques conseils
Ne pas oublier que les Noms de Code (mots à deviner) ne sont pas associés entre eux mais qu’ils ont individuellement leur propre lien avec l’indice. Exemples :
- Invention – 3 : moteur, télescope et électricité
- Lave – 3 : fumée, volcan et rivière
- Français – 3 : fromage, croissant et cousin
Il faut également se rappeler lorsqu’on devine ou lorsqu’on donne les indices qu’on peut y aller par élimination. De là la rejouabilité, car chacun des mots sera abordé autrement dans une autre combinaison de 25 cartes.
Important :
- expliquer les mots si nécessaire au début pour éviter les questions en cours de partie
- lire tous les Assassins et tous les mots et les relire avant de donner chacun des indices
- rester neutre/ne pas se regarder (même qu’on met souvent nos mains sur notre front, en « casquette »)
Par rapport à Codenames…
Quelqu’un qui n’a pas joué à Codenames, toutefois, n’est pas supervisé dans cette version, puisqu’on ne joue qu’à deux (même s’il y a une variante à plus de deux joueurs). Le jeu peut être un peu plus ardu à maîtriser pour quelqu’un qui n’a pas joué à Codenames, mais c’est simplement parce qu’il devra apprendre les principes de base de la série et les règles à respecter pour qu’une partie se déroule bien et sans tricherie. Heureusement, ces points sont bien précisés dans les règles dans une section À retenir.
Deviner et faire deviner en même temps est la plus grande force de Codenames Duo par rapport à Codenames. Dans ce dernier, on a toujours hâte de jouer l’autre rôle, et le temps d’attente peut être relativement long quand le donneur d’indices a de la difficulté à trouver. Ici, pendant qu’on attend l’indice, on peut réfléchir à notre prochain indice.
Un avantage aussi est de moins ressentir l’impression d’être bloqué lorsqu’on donne des indices. Dans Codenames, si l’Assassin nous nuit, il nous nuit pendant toute la partie. Dans Codenames Duo, un seul des trois Assassins en est un pour les deux joueurs, c’est-à-dire que les deux autres pourraient être recouverts d’une tuile Identité au cours de la partie. Il y a donc plus de stratégie de parfois décider de remettre à plus tard un indice, pour probablement avoir moins de cartes qui interfèrent avec celui-ci. Exemple : attendre que le mot Antarctique soit déjà recouvert avant de donner Glace comme indice pour Manchot et Pic.
Codenames Duo se démarque évidemment de son grand frère par sa possibilité de jouer à deux joueurs, sans avoir moins de plaisir, au contraire. Plus rares sont les jeux de mots modernes qui se jouent bien à deux joueurs (contrairement aux plus anciens Scrabble, Boggle, Scattergories), c’est donc un atout considérable.
En conclusion
La série Codenames se démarque par son concept, car on y joue avec notre imagination et non pas avec les mécaniques traditionnelles. C’est là toute la beauté des jeux de la série, car en y jouant, on interagit constamment, on creuse dans nos connaissances et dans notre vocabulaire et inévitablement, on crée un beau moment de complicité avec notre partenaire de jeu. Évidemment, quand tout se passe bien. Comme tous les jeux de déduction et de limites de communication, Codenames Duo est à son meilleur lorsque la dynamique du groupe de joueurs est propice à la complicité et aux rires.
D’un autre côté, il fait travailler le vocabulaire, la langue française et l’imagination. Il sera donc parfait pour jouer de façon plus « éducative » avec des jeunes.
Si comme moi vous avez déjà joué à Codenames et que vous avez aimé, je suis convaincue que vous allez adorer Codenames Duo.
Avoir déjà joué à un jeu de déduction où il y a des limites de communication est un atout. Quelques exemples :
- Hanabi : Grands Feux
- Dixit
- Mysterium
- One Key
- Just One
- Decrypto
- Detective Club
Si Codenames n’est pas dans vos jeux déjà essayés, Codenames Duo est un bon achat et une excellente introduction à la série. Même sans savoir avec certitude si ça va « lever » avec votre partenaire de jeu, je n’hésite pas une seconde à vous recommander de l’essayer.
J’aime
- Le concept original
- Pouvoir y jouer à deux
- La rejouabilité
- Jouer avec la langue française
J’aime moins
- …
La copie de Codenames Duo a été fourni par IELLO France.
Codenames Duo
Graphisme
Matériel
Thématique
Mécanique
Plaisir
Une petite perle
Un jeu à considérer, que vous soyez déjà amateur de la série Codenames ou non.