Développé par les Productions Fougarou, Mon Samsara est un jeu de simulation offrant une expérience introspective sur les habitudes de vie et de consommation des joueurs. Dans le jeu, vous contrôlez la vie d’une personne en lui apportant des aliments, objets et relations personnelles pour son bon développement. Néanmoins, il sera important de savoir bien doser et trouver le juste équilibre afin que cette vie dure le plus longtemps possible.
Mon Samsara se révèle être une expérience courte qui offre une grande rejouabilité, de par la multitude d’objets et de relations de cause à effet que l’on peut rencontrer. Le jeu est disponible gratuitement sur itch.io et peut se jouer directement dans votre navigateur et est très facile à prendre en main puisqu’il se contrôle uniquement avec la souris.
Mon Samsara : la genèse
Jean-Christophe Pelletier qui est le directeur créatif et producteur du jeu nous explique que c’est en 2007 que l’idée de Mon Samsara émerge dans son esprit après la naissance de son fils. La paternité ayant refaçonné sa vie, il s’est rendu compte qu’il avait maintenant moins de temps à consacrer aux activités qu’il aimait. Toutefois, les objets reliés à ces activités demeuraient présents autour de lui tels des vestiges et agissaient comme un rappel de sa vie passée. Ressentant une certaine culpabilité de ne plus pouvoir utiliser ces outils autrefois primordiaux dans sa vie, Jean-Christophe eu l’idée de créer un jeu qui parle du lien que l’on peut avoir avec certains objets et personnes et l’énergie que cela requiert de continuer à maintenir ces liens.
Jean-Christophe s’est aussi inspiré de la religion bouddhiste, d’où lui vient le titre du jeu et une des mécaniques centrales ainsi que de plusieurs films comme Koyaanisqatsi de Godfrey Reggio ainsi que des jeux comme Proteus développé par Ed Key.
Cependant, ce n’est qu’en 2013 que le premier prototype voit le jour, la production du jeu s’étant étalé sur plusieurs années, car Jean-Christophe devait assurer ses contrats d’enseignements, ce qui lui laissait peu de temps pour travailler sur son projet.
En 2018, Raphaël Dely lui propose son aide pour la programmation et décide de recoder le jeu dans un engin plus flexible qui leur laissa davantage de libertés créatives.
“Un des plus grands défis a été de devoir jongler entre différents rôles comme designer, artiste, programmeur et sound designer puisque chacun a des contraintes et des besoins particuliers.”
Assurer plusieurs rôles et en effet difficile puisqu’il faut constamment trouver un équilibre entre la logique froide que demande la programmation et l’innovation du design par exemple. De plus, certaines compétences peuvent manquer dans un des champs et peuvent venir bloquer ou limiter la créativité dans les autres domaines, c’est alors une poursuite de l’équilibre entre les rôles qui se met en place, afin qu’ils puissent cohabiter harmonieusement.
Plus tard, il rencontra Max Romain, le sound designer du jeu qui créa la banque de sons et musiques de Mon Samsara.
“Au début, j’avais un son par silhouette, mais j’ai vite réalisé que je ne pourrais pas trouver des milliers de sons. Alors nous avons cherché à créer des ambiances mixtes qui représentaient des familles de silhouettes, cela a été un vrai défi design de les catégoriser.”
La roue de vie : le point central du jeu
La roue de vie est un concept qui vient de plusieurs religions comme l’hindouisme ou le bouddhisme et est représenté dans Mon Samsara par le grand cercle doré qui entoure notre avatar. Ce cercle représente notre champ d’actions possibles. En effet, lorsqu’une silhouette rentre dans le cercle il est alors possible de l’attraper contre une certaine dose et un type d’énergie. Une fois qu’une silhouette est reliée à l’avatar, elle assouvira un besoin spécifique de sa catégorie.
Choisir, c’est renoncer. –André Gide
Il faut cependant faire attention à maintenir une certaine homéostasie, en gérant de manière équilibrée les énergies qui nous sont disponibles. Ainsi, à travers vos choix et non-choix vous simulez la vie d’une personne jusqu’à sa mort. Il est conseillé de rejouer plusieurs fois au jeu pour comprendre les rouages et finesses qui le régissent.
La matérialité : à la croisée entre philosophie et bouddhisme
“Je me suis alors rendu compte que les objets que je possédais me possédaient en retour, car toute l’énergie que j’avais dépensée pour les acquérir et les utiliser créait une obligation subtile en moi.”
La matérialité à travers soi
Dans Mon Samsara, le joueur est représenté par un avatar au centre de l’écran qui fait figure de Corps. Corps est l’expression même de notre matérialité et des besoins primaires. Reconnaissant alors la nécessité du Monde et de sa physicalité, ce Corps nous empêche donc de nous élever vers des hauteurs intellectuelles et spirituelles, et doit alors être réduit.
La matérialité du Monde
Les liens qui rattachent l’avatar aux différentes silhouettes dans Mon Samsara représentent symboliquement la poursuite de soi, puisque nous nous connaissons par un rapport à l’Autre. L’Autre étant représenté ici par tout ce qui n’est pas nous, donc les objets, personnes et aliments que nous nous octroyons. Le rapport à notre propre matérialité, le Corps ici et celle de l’Autre (ce qui n’est pas nous) façonne donc notre vie et en donne le sens.
Véritable représentation minimaliste de la vie, Mon Samsara nous offre une multitude de choix à prendre au sens propre comme au figuré, de vivre les conséquences de ces derniers et nous suggère la possibilité de lâcher prise. À la même manière qu’un test de Rorschach, le jeu nous laisse interpréter et mettre du sens dans les silhouettes qui apparaissent sous nos yeux.
Mon Samsara nous propose donc une expérience qui dépeint le présent, puisque nous essayons de saisir les bons moments ou les bons objets par peur qu’ils nous échappent. Souci, donc de profiter de ce qui peut être tenu par soi-même.