Collaboration spéciale de Bruno-Pierre Campeau de chez Multijoueur
Le nouveau jeu de Square-Enix et de Sillicon Studio est ce qu’on peut considérer de surprenant. Pas parce qu’il a pris pas loin de deux ans pour se rendre sur notre continent ou le fait que c’est un des rares jeux de rôle disponible sur la console portable de Nintendo. Il n’implique pas un sympathique plombier, n’est pas une version remastérisée d’un jeu de PlayStation 2. Ce qui est surprenant est que le jeu a réussi à reprendre une formule classique, mature et vaccinée et de la réinventer avec une plus grande profondeur.
Bravely Default reprend tous les éléments des jeux classiques des premières générations de la franchise Final Fantasy. Le jeu n’est pas un hommage, mais bien une reprise en main des concepts abandonnés par cette dernière. On passe des noms de sorts comme Cura et Fira jusqu’aux cristaux des quatre éléments, en passant par le système de classes qui donne des abilités différentes aux 4 personnages. Le combat reprend aussi la base classique des jeux de rôles japonais qui se déroulent à tour de rôle. Bref, c’est Final Fantasy sans le nom… Étrangement, on dirait que le jeu respire mieux et bénéficie de plus de créativité sur les mécaniques de jeu en place.
C’est réellement les combats qui brillent dans l’expérience de jeu. Bravely Default insère de nouvelles actions éponymes tel que les braves et les defaults. Les braves permettent d’utiliser des « brave points » (BP) pour ajouter jusqu’à quatre actions en un tour. On peut prendre des actions en avance, ce qui vous fera sauter un tour de combat par point sans réelle défense. Un autre système entre ensuite en jeu : chaque personnage et ennemi peut utiliser une action nommée default pour prendre une posture défensive pendant un tour et garder un BP en banque pour le tour suivant.
Cette nouvelle dimension change considérablement le déroulement des combats. La stratégie devient beaucoup plus profonde avec la multitude d’abiletés des personnages et leurs classes permettent des combinaisons infinies. Bien souvent, des pouvoirs passifs rendront certains sorts ou abiletés plus puissantes. D’autres pouvoirs permettront une plus grande aisance à exécuter des stratégies de combat sur le terrain pour éviter des erreurs qui peuvent souvent s’avérer fatales. Bravely Default n’est pas juste une histoire de monter de niveau et de battre le méchant, il faut être rusé et stratégique pour y arriver.
Bravely Default est aussi un jeu visuellement plaisant et intéressant à explorer. Bien qu’aller d’un endroit à un autre revient à la fameuse mappemonde où notre personnage est surdimensionné, les endroits importants sont des rendus dessinés tels que l’artiste le voyait dans ses designs originaux. Le meilleur exemple est la première ville où les personnages se rencontrent, qui coupe le souffle. L’utilisation d’anamorphose, soit une image bidimensionnelle pour donner l’impression d’être dans un environnement tridimensionnel, pour représenter les villes d’importance ajoute un enchantement additionnel. Il permet de mieux imager les différentes scènes sans taxer la console en utilisant des graphiques trop poussés.
Le résultat des choix au niveau du graphisme donne un résultat aigre-doux. Certaines scènes peuvent devenir visuellement maladroites : les personnages étant minimalement détaillés dans l’océan de détails qui leur servent de déco, ils semblent être des poupées de chiffon qui détonnent sur le reste.
L’harmonie brisée par ces différents petits détails peut être pardonnée. Le jeu offre trame sonore presque entièrement orchestrale et offre des moments forts. Que ce soit un combat contre un ennemi difficile ou un simple mécréant dans les champs, le jeu offre quelque chose de magique pour les oreilles. La musique et les effets sonores sont variés, intéressants et permettent de garder l’attention vers le jeu et les différentes ambiances sont mises de l’avant avec brio.
Malheureusement, quand on arrive au département des voix… on aurait pu s’en passer. Il est vrai que certains personnages prennent vie grâce à ces mêmes dialogues. Ceci étant dit, certaines conversations peuvent devenir lourdes. Bien souvent, l’acteur semble lire son texte sans trop vouloir se forcer plutôt que de donner une performance convaincante.
Comme expérience de jeu de rôle classique japonais, Bravely Default a pris un risque pour faire revenir une formule et une histoire digne de l’ère du Super Nintendo. Est-ce que prendre ce risque a payé ? Je suis mitigé sur le sujet. Il est vrai que le système de combat classique avec ses ajouts modernes a passé le test du temps. Il n’aurait pas été question, non plus, de faire revenir les éléments classiques d’un jeu de rôle sans leur donner une cure de jeunesse.
Néanmoins, il faut passer la première impression d’un jeu classique sans plus. Avant que l’histoire, le jeu et le combat retapé obtiennent tout leur sens, il faut investir plusieurs heures, ce qui peut devenir un mur pour certains.
Ceci étant dit, Bravely Default reste le retour d’un type de jeu qui manquait cruellement sur la console, malgré quelques additions intéressantes. Le jeu nous fait en redemander plus et pour ceux, comme moi, qui s’étaient éloignés du genre, c’est un excellent retour aux anciens amours. Il faut simplement pouvoir figurer certaines choses par soi-même et surtout, avoir du temps.