Les lecteurs plus âgés se souviendront d’une époque où l’on pouvait trouver des comics près des caisses à l’épicerie ou la pharmacie. Malheureusement, cette époque est maintenant révolue. Le marché des kiosques à revues a été écrasé par le marché direct (j’y reviendrai). Aujourd’hui, DC Comics tente de rendre le médium plus accessible sans retourner dans le passé : cette tentative passe par les comics numériques !
Un peu d’histoire
Un brin de contexte s’impose avant de plonger dans le développement des comics numériques. Ainsi, il est bon de rappeler que pendant les 40 premières années d’existence des comic books américains, la seule façon de se les procurer était de se rendre dans un magasin (épicerie, pharmacie, tabagie, etc.) et trouver la section. Cette stratégie était risquée et certainement peu fiable. Par exemple, un lecteur d’une certaine série n’avait aucune garantie de trouver le numéro suivant au moment de sa sortie. Il devait alors écumer les différents étales à la recherche de l’édition recherchée. Cette mise en marché serait absolument inconcevable de nos jours alors que la condition des comics est convoitée autant sinon plus que l’histoire qu’ils contiennent.
Avec le temps, les distributeurs ont développé une nouvelle méthode de mise en marché : le marché direct. Cette façon de faire passe par des abonnements. Pour reprendre l’exemple plus haut, le consommateur peut désormais réserver les numéros de sa série préférée dans une boutique spécialisée. D’ailleurs, le marché direct a justement l’avantage de la prévisibilité autant pour le lecteur que le marchand : on sait quand le numéro sort et le client a l’assurance d’avoir sa copie (dans un bel état) à la date prévue. Le marché direct, né dans les années 1970, a remplacé le marché des kiosques dans les années 1990. Ce tournant et cette stratégie ont toutefois un défaut important : le manque d’accessibilité.
Popularité et ventes
DC Comics ne fait pas des efforts avec ses comics numériques pour le plaisir. Ils sont nés d’un constat. Les super-héros n’ont jamais été aussi populaires. Les films de Marvel et de DC engrangent des centaines de millions de dollars. On trouve des logos et des visages de ces personnages sur toutes sortes de marchandises. Or, il ne s’est jamais vendu aussi peu de comics. Étrange non ? Par exemple, les comic books des X-Men se vendaient par millions (ce n’est pas une exagération) dans les années 90. Aujourd’hui, Marvel Comics sabre le champagne quand un numéro vend 100 000 copies.
Naturellement, les questions financières sont importantes. En effet, le prix des comics a augmenté beaucoup plus rapidement que l’inflation dans les dernières années. Cela ne peut cependant pas être le seul facteur derrière le recul des ventes.
L’autre changement majeur est l’accessibilité. Avec la disparition des comics des kiosques à revues, un amateur de Spider-Man ne peut plus, ou presque, tomber sur un numéro par hasard. Pour le trouver et l’acheter, il doit se rendre dans un magasin spécialisé qu’il ne connait peut-être même pas. Il écoutera les films et les séries animées, mais il n’aura pas l’occasion de lire le matériel original.
Les comics numériques
La pandémie a mis à l’arrêt pendant quelques semaines la publication et le développement des comics. DC Comics a profité de cette période pendant laquelle les magasins spécialisés étaient fermés pour lancer son offensive avec des comics numériques exclusivement en ligne. L’éditeur a en effet annoncé le lancement de la collection DC Digital First avec principalement deux séries : Injustice : Year Zero (inspiré de la série de jeux vidéo Injustice) et DCeased : Hope at World’s End écrites par Tom Taylor. C’est le scénariste derrière la nouvelle série Seven Secrets.
Ces séries sont publiées mensuellement sur Comixology ou sur la plateforme numérique de DC Comics. Chaque numéro est notamment plus court qu’un comic « conventionnel ». L’attrait est dans le prix : 0,99 $ par numéro.
Le calcul de DC Comics me semble simple : tous les consommateurs potentiels ne vivent pas à proximité d’un magasin spécialisé, mais ils ont tous accès à un téléphone intelligent, une tablette ou encore un ordinateur. Ce sont trois moyens de lire les comics numériques. Avec des comics exclusivement en ligne à bas prix, l’éditeur prend le risque d’attirer de nouveaux lecteurs sur les différentes plateformes numériques. On crée ainsi un nouveau converti et le médium devient un peu plus accessible !
Je peux désormais boucler la boucle avec mon titre : le bonheur des uns fait le malheur des autres. Dans ce cas, les autres sont les propriétaires de boutiques spécialisées. Ceux-ci ont été éprouvés par la fermeture de leur commerce dans les derniers mois et nombre d’entre eux perçoivent l’initiative de DC Comics comme un court-circuit qui détourne des clients potentiels. Leur point de vue est compréhensible.
Je crois toutefois que tout comic vendu, numérique ou non, est un bon comic. Rien ne garantit que le lecteur de comics numériques aurait été faire un tour en magasin. Selon moi, c’est une façon légitime de faire vivre le neuvième art à condition que les éditeurs, comme DC Comics, et les consommateurs continuent d’appuyer les femmes et les hommes d’affaires qui administrent des boutiques spécialisées.
Bien d’accord, les comics numériques sont une bonne idée… mais lire un BD sur son cell? Vraiment? Me semble que le format ne »fit » pas. Sur tablette ou sur ordi, c’est mieux, me semble.
Chacun ses goûts mais je suis d’accord quand-même. J’ai beaucoup de comics digitaux et je les lis sur une tablette 10 pouces. Il n’était pas question pour moi d’avoir plus petit que ça. Avec 10, ça s’approche le plus du format BD « normal ».