Surviving Mars : la planète rouge sans pitié

C’est la prochaine frontière, la prochaine étape dans la course incessante de l’humanité afin d’explorer de nouveaux mondes. C’est connu, la NASA prévoit envoyer une première mission habitée sur la planète Mars dans les années 2030. De son côté, le jeu Surviving Mars catapulte les joueurs dans un futur pas si lointain alors que les phases d’exploration de la planète rouge sont désormais presque complétées et que le temps est venu pour l’établissement d’une colonie permanente et autosuffisante sur cette planète.

Le joueur est chargé de l’établissement de cette colonie, de son développement et de sa gestion. Par contre, dans ce jeu de construction de cité (city builder) à un seul joueur, il y a peu de place pour les erreurs. Par exemple, une panne électrique pourra avoir des impacts presque immédiats sur l’approvisionnement en oxygène des dômes habités, entraînant des conséquences extrêmement préjudiciables sur l’essentielle et fragile population de colons. Nous sommes très proches d’un Banished – dont nous avons publié une critique très complète – mais sur une autre planète. Dans les deux cas, le futur de la colonie dépend des actions du joueur et de sa capacité à organiser tout ce beau monde.

  • Studio de développement : Haemimont Games / Abstraction Games (depuis 2019)
  • Éditeur : Paradox Interactive
  • Plateformes disponibles : PC, MacOS, Linux, PlayStation 4 & Xbox One
  • Plateforme de test : PC
  • Date de sortie : 15 mars 2018
  • Classement : Everyone 10+
  • Prix : 33,99$
  • Page Steam du jeu

Notons ici que les développeurs ont une solide expérience en jeux de gestion de cité puisqu’ils sont à l’origine des opus 3, 4 et 5 de la populaire série de simulation de dictature sur une île paradisiaque des Caraïbes, Tropico. Surviving Mars est publié par Paradox Interactive, qui a aussi dans son portfolio le méga succès Cities : Skyline que plusieurs considèrent comme l’héritier spirituel de SimCity. Disons donc que Surviving Mars commence avec une longueur d’avance en raison de l’expérience des équipes qui ont travaillé à son développement et à sa publication.

Décollage

Le jeu débute alors que le joueur doit se choisir un commanditaire pour financer et appuyer son entreprise de colonisation. Le choix du commanditaire donne accès à des capacités uniques, des unités un peu différentes et des succès personnalisés. Dans la liste des commanditaires, on retrouve des choix classiques, comme les États-Unis ou la Chine, mais aussi des compagnies et même une Église. Si le choix du commanditaire ne change pas l’objectif de la partie – bâtir une colonie fonctionnelle et autosuffisante sur Mars – elle peut changer la façon d’y arriver. Par exemple, l’Union européenne offre au joueur un grand bonus de recherche, mais offre un prix d’achat de minéraux plus que moyen. Avec ce commanditaire, il faudra donc opter pour des solutions innovantes pour assurer son financement à moyen et long termes.

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Le choix d’un commanditaire aura des incidences sur l’ensemble de la partie. Parmi les choix disponibles, une compagnie méconnue qui se nomme SpaceY…

L’étape suivante est d’ajouter une vocation à votre commandant de mission pour davantage de personnalisation de vos options puis de choisir un site sur Mars. Une chose passionnante à savoir à cet effet est que les territoires sur la planète rouge ont été réalisés sur la base de vraies photos et analyses de la NASA. C’est comme y être pour vrai ! Chaque lieu aura aussi son lot de caractéristiques sur l’accès aux ressources et sur les dangers. Ces derniers, qui comportent des tempêtes de poussière, des pluies de météorites ou des vagues de froid, peuvent grandement affecter le développement de votre colonie.

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Le choix du lieu pour la fondation de la colonie martienne permet d’influencer le degré de difficulté de la partie. Les lieux sont par ailleurs basés sur de réels relevés de la NASA.

Une terre de drones

Une fois le lieu parfait choisi, il ne reste qu’à faire atterrir votre première navette, qui ne comptera aucun humain à bord. Bien que le jeu ait certains éléments de science-fiction, nous restons bien près de ce que sont les théories les plus plausibles aux yeux de la science d’aujourd’hui quant aux étapes de développement d’une colonie sur Mars. Les concepteurs du jeu ont fait de nombreuses recherches et entrevues avec des experts du domaine, dont des chercheurs de la NASA, pour présenter un cadre réaliste de l’établissement d’une colonie sur Mars.

C’est pourquoi les premières étapes n’impliquent pas encore des êtres humains. C’est une véritable petite armée robotisée que les joueurs contrôlent afin de préparer le site à la venue des premiers colons. Il faudra mettre en place les infrastructures de base : génération d’électricité, extraction d’eau, production des matériaux de construction, fabrication d’oxygène et, sans oublier, la création de carburant. Cet élément est le début des chaînes plus complexes de production puisqu’il faut de l’eau et de l’électricité pour briser les molécules d’eau afin d’en tirer de l’hydrogène, un puissant carburant. Cette technique, déjà applicable avec les technologies disponibles dans notre monde réel, permettra de renvoyer la navette sur la Terre afin d’acheminer davantage de matériel et, éventuellement, des colons en chair et en os dans votre colonie. 

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Ces drones s’affairent à décharger les ressources contenues dans la navette et à bâtir les premières infrastructures, comme les panneaux solaires.

Notons que les drones ont une portée limitée, ce qui affectera la capacité de la colonie de gérer la logistique et l’infrastructure des zones éloignées. C’est un problème fréquemment montré du doigt par la communauté, bien qu’il s’agisse en fait d’une mécanique de jeu ajoutant aux joueurs le défi de ne pouvoir étendre sa colonie sans avoir acquis la technologie permettant de construire des transbordeurs spécifiquement destinés au transport longue distance. 

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Les premières infrastructures visent à donner suffisamment d’autonomie à la colonie pour qu’elle puisse construire des dômes et accueillir des colons.

À cette étape du développement de la colonie martienne, les enjeux sont somme toute modérés. Une pénurie de matériaux pourrait avoir des effets néfastes sur les infrastructures naissantes ou sur la performance des drones, mais ce n’est qu’en réalisant l’étape suivante, l’arrivée d’êtres humains dans la colonie, que la cadence et la courbe de difficulté s’accroissent.

Pour que les colons puissent arriver sur la planète rouge, le joueur doit leur fournir un dôme permettant de répondre à certains besoins de base. Évidemment, il s’agit d’une infrastructure fragile et gourmande en ressources. Cela est non seulement nécessaire afin d’atteindre les objectifs de la partie, mais il faut noter que certains bâtiments ne peuvent être activés que par des humains, par exemple des centres de recherche ou des mines de minerais. Pour assurer le futur et l’autosuffisance de la colonie, l’étape de l’arrivée des humains est donc essentielle et elle doit être exécutée avec brio.

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Les colons vivent et travaillent sous ces dômes qui les protègent des rigueurs de la planète rouge.

Les fondateurs

Une fois le dôme construit et garni de logements, de fermes et de services aux colons, il sera possible de recevoir les premiers résidents. Ceux-ci seront nommés à juste titre les “fondateurs” de la colonie et le commanditaire du joueur évaluera le succès des premières étapes de la colonisation sur la base de leur satisfaction. Comme chaque colon a des compétences et des besoins spécifiques, il faudra bien choisir qui compose la première équipe puisqu’elle doit rendre la colonie fonctionnelle sans espoir de renforts à court terme. En effet, les voyages contenant des êtres humains et la Terre seront bloqués tant que la phase d’évaluation de l’expérience des “fondateurs” ne sera pas terminée… ou qu’un premier bébé naisse, le premier Martien à proprement parler. Pour cette seconde option, par contre, il faudra offrir suffisamment de confort aux colons puisqu’ils ne se reproduiront pas tant que la colonie ne peut réalistement soutenir un accroissement de la population.

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L’arrivée des premiers habitants permanents en chair et en os sur la planète rouge est un jalon important dans l’histoire de la colonie martienne

Chaque colon est individuellement simulé et cherchera à remplir ses besoins et à se rendre à son emploi par lui-même. Le joueur a pour tâche de mettre à sa disposition les infrastructures lui permettant de le faire. Les colons ont également des professions, comme botaniste ou chercheur, qui les rendent plus performants – et heureux – s’ils occupent des postes dans ces professions. La gestion de leur confort et de leur moral est une clé pour s’assurer qu’ils effectuent leurs tâches avec compétence ou qu’ils ne quittent pas la colonie à bord de la prochaine navette. Notons également qu’il est éventuellement possible d’accueillir des touristes venus faire l’expérience temporaire de la vie martienne en échange d’une certaine source de revenus pour le joueur. 

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Le choix des colons doit tenir compte des emplois à pourvoir dans la colonie, mais également de la personnalité des candidats.

C’est vraiment dans ces développements que la courbe commence à s’accélérer rapidement. Par exemple, certains colons auront besoin d’étancher leur soif de magasinage ou de s’amuser avec des objets technos à la mode. De vrais geeks eux aussi ! Or, pour cela, il faudra construire un magasin d’objets technos, lui fournir les ressources humaines – pas des drones – et l’approvisionner avec lesdits objets technos, une ressource qui au départ ne provient que de la Terre. Avec un peu de recherche – qui requiert davantage d’humains oeuvrant dans les centres de recherche sur Mars -, il est possible de débloquer les usines d’objets technos, qu’il faudra aussi garnir d’employés humains et approvisionner en minéraux. Et toute cette chaîne complexe doit tenir compte des ressources en eau, nourriture, oxygène et électricité de la colonie. On note donc que la courbe s’accélère rapidement, ce qui procure un sentiment de grandeur très satisfaisant… tant que tout fonctionne au quart de tour.

Houston, ce n’est pas la porte d’à côté

La courbe de difficulté du jeu est donc exponentielle. À partir de l’atteinte d’un certain équilibre, chaque futur développement devra être méticuleusement analysé et préparé. Par exemple, avoir une usine de drones serait un atout formidable pour ne plus dépendre des livraisons terriennes pour l’approvisionnement en robots. Or, en allant de l’avant, quels seront les impacts sur la consommation d’électricité, sur les emplois disponibles ? Il faudra assurément ajouter des colons pour assurer le fonctionnement de l’usine. On parle alors d’une demande accrue en nourriture, eau, oxygène, logement, électricité et services. 

Un autre défi dans tout ce casse-tête tient de l’approvisionnement en provenance de la Terre. Jusqu’à l’atteinte d’un certain niveau technologique et de développement de la colonie, il faudra continuer de planifier des allers-retours avec la mère patrie pour assurer l’approvisionnement dans certaines denrées difficiles à produire sur la planète rouge, mais aussi de certains bâtiments pour lesquels il vous faudra débloquer l’accès via la recherche scientifique dans la colonie.

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L’arrivée de ressource en provenance de la Terre peut parfois sauver une colonie à la veille d’une catastrophe, faute d’équipement pour entretenir ses infrastructures.

Évidemment, commander des pièces, des colons et de l’équipement d’une planète à 225 millions de kilomètres d’éloignement, en moyenne, ne se fait pas en criant “ciseaux !”. En fait, dans la vraie vie, la fenêtre pour permettre à une navette de la Terre de se rendre sur Mars doit tenir compte de la distance minimale entre les planètes et de l’utilisation des orbites pour propulser les vaisseaux, mais Surviving Mars nous épargne ces détails logistiques. Le jeu propose simplement un décompte entre le départ de la navette de la Terre et son arrivée à la colonie. Cela signifie qu’une rupture de stock en pièces de machines, par exemple, ne pourra se régler rapidement et doit être farouchement appréhendée. Puisque ces pièces sont essentielles à l’entretien du réseau de production d’électricité et qu’elles ne peuvent être produites sur Mars au départ de la partie, un inventaire vide entraîne une panne d’électricité dont les conséquences peuvent être fatales pour la colonie.    

Et ces exemples ne tiennent compte que des éléments qui sont prévisibles. Les tempêtes de poussières, les vagues de froid ou les pluies de météores peuvent survenir à tout moment et prendre le joueur par surprise. C’est dans ces moments, en attente d’une navette ou avec des fonds dramatiquement bas que le jeu fait prendre toute la mesure de l’isolement et de la précarité d’une colonie sur une autre planète que la nôtre.

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Les tempêtes de poussière empêchent les générateurs d’eau et les panneaux solaires de fonctionner. Il faut avoir fait des réserves et charger les batteries pour éviter le pire.

Pas pour les impatients

Surviving Mars propose une expérience complète et intense de gestion d’une colonie sur une autre planète. Des contenus téléchargeables viennent bonifier l’expérience en permettant la terraformation de la planète rouge ou en ajoutant des colonies adverses. De plus, dans chaque partie, il sera possible d’explorer des mystères et des quêtes aléatoires qui vont d’une étrange pandémie sur Terre qui rend les contacts plus complexes à des interactions avec une intelligence artificielle développée. En ajoutant à cela les divers combos de commanditaires et de commandant de mission, des modes de jeu alternatifs, une abondance de cartes et différentes tactiques possibles, il est clair que Surviving Mars a une durée de vie exceptionnelle et une rejouabilité pratiquement sans fin.

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Sans oublier une panoplie d’événements aléatoires aux conséquences positives ou négatives sur la colonie qui augmentent également la rejouabilité de Surviving Mars.

Il faudra toutefois s’armer de patience, puisque de voir sa colonie réduite à néant en raison d’une mauvaise manœuvre du joueur ou d’un désastre imprévisible peut devenir décevant, surtout après plusieurs heures investies dans ce monde virtuel. Surviving Mars n’est pas complaisant avec les joueurs et il faut s’attendre à plusieurs essais-erreurs avant de trouver une formule gagnante. Le jeu propose bien un tutoriel qui présente les mécaniques de base, mais pour bien maîtriser le développement d’une colonie sur Mars, il faudra souvent se tourner vers les forums et plateformes de diffusions de contenu pour s’enrichir de l’expérience d’autres joueurs.

Les graphiques ne sont pas exactement sur la fine pointe, mais ce n’est pas un aspect majeur pour un jeu de construction de cité. La trame sonore, pour sa part, est très bien choisie pour évoquer l’exploration spatiale et les mystères entourant la colonisation de Mars. Elle supporte très bien le jeu sans devenir agaçante ou trop répétitive. Il y a d’ailleurs moyen de changer de “canal de radio” pour davantage personnaliser l’expérience sonore. 

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La naissance d’un premier bébé sur Mars – du premier Martien – est une étape émouvante pour la colonie, mais aussi une démonstration d’une qualité de vie suffisante dans les dômes.

En bref, Surviving Mars saura plaire aux amateurs de jeux de gestion de cité qui n’ont pas peur d’un défi robuste dans un environnement nouveau. Il donnera des défis de logistiques et de planifications importants qui sauront garder l’aventure martienne dans une perpétuelle tension entre le développement de la colonie et la préservation ou l’acquisition de ressources essentielles. Par contre, c’est beaucoup moins un jeu pour les amateurs de bacs à sable – bien que ce mode de jeu soit disponible –  qui aiment peindre un paysage urbain à leur image, comme dans d’autres grands titres de gestion de cité.

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Comment oser abandonner ces petits drones si sympathiques ? Surviving Mars est le genre de jeu qui fait perdre la notion du temps alors qu’on essaie de bâtir un Eden sur la planète rouge.

J’aime

  • Le défi de bâtir une colonie autosuffisante sur Mars
  • Le contenu basé sur la science actuelle
  • Le degré de difficulté qui ne pardonne pas
  • L’immense durée de vie et de rejouabilité

J’aime moins

  • Voir ma colonie dépérir :(
  • Certaines manoeuvres répétitives, surtout en repartant à zéro souvent

La copie de Surviving Mars a été achetée par le rédacteur.

Surviving Mars

Scénario
Graphisme
Bande sonore
Jouabilité
Durée de vie

Bip-bop !

Surviving Mars propose une expérience complète, sans compromis, de la colonisation de Mars. Largement basé sur la science actuelle, ce jeu permettra aux amateurs de construction de cité de s’exercer dans un univers rarement visité dans le genre, avec tous les défis que l'exploration spatiale impliquent. Une poignée de drones saura-t-elle vraiment préparer l'arrivée de colons sur Mars ?

À propos de Yanick Grégoire

Toujours à la recherche de la prochaine perle rare, je m’intéresse aux développements et à l’actualité dans les mondes des jeux vidéo, des jeux de société et d’un peu tout ce qui touche à la culture geek. Dans ma vie professionnelle, je suis spécialisé en communications et dans ma vie personnelle, j’ai une bonne armée de Nains à Warhammer Fantasy. Parfois, je fais des blagues, rarement avec succès.

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