Le Festival International d’Animation d’Ottawa (FIAO/OIAF) qui a eu lieu du 26 au 30 septembre nous présenta sept longs métrages cette année. Le Québécois Félix Dufour-Laperrière nous offrait une révision de l’histoire du Québec un peu lourde et sans but précis avec Ville Neuve. Tandis que l’Estonien Kaspar Jancis mettait en œuvre un conte en stop-motion peu original, mais plutôt amusant pour les jeunes enfants, qui rappelait James et la Pêche Géante du créateur Henry Selick. Dans cet article je discuterai de trois longs métrages qui auront su me plaire et m’étonner : On Happiness Road, Ce Magnifique Gâteau ! et Virus Tropical.
On Happiness Road (4.5/5)
La réalisatrice Taiwanaise Hsin-yin Sung, présente dans la salle, nous montrait son tout premier long métrage intitulé Hsing Fu Lu Shang (On Happiness Road).
L’histoire
Après le décès de sa grand-mère, Chi, d’origine taïwanaise, mais vivant maintenant aux États-Unis, retourne à Taipei. Enceinte et se questionnant sur son mariage à un américain, elle navigue dans la ville se remémorant son enfance et son adolescence. Cette histoire autobiographique et par conséquent très personnelle met aussi en animation l’histoire politique et sociale de Taiwan. Dans la tradition des réalisateurs de la Nouvelle Vague tels que Hou Hsiao-hsien, Sung met en image des moments clés tel que la « Terreur blanche ». Ces moments façonnent la personnalité de Chi, tout en la laissant s’évader dans des scènes hautes en couleurs où elle se perd dans son imagination.
Critique
Honnêtement, c’est mon film préféré présenté au festival cette année. Sung nous partage une histoire solide racontée en plusieurs temps. Une stratégie narrative qui aide à façonner et apprécier un personnage principal complexe et tridimensionnel. Le film nous propose une enfance remplie d’imagination où une jeune Chi obsédée par l’anime Candy Candy s’imagine dans sa peau, trouvant son prince charmant. Ces moments idylliques sont entrecoupés avec une adolescence maladroite et sa vie d’adulte un peu plus nuageuse. En somme, le récit d’une femme qui grandit retrouvant ses racines dans une ville, une nation qui elle aussi apprend et grandit à façon vers son indépendance. On Happiness Road est un film d’animation aussi bien construit au plan visuel qu’au niveau narratif et vous fera rire, sourire et pleurer à la fois.
Ce magnifique gâteau ! (4/5)
L’œuvre surréaliste de stop-motion réalisée par Emma de Swaef et Marc James Roels est une coproduction entre la Belgique, la France et les Pays-Bas. Ce magnifique gâteau ! s’est vu remporter le prix du meilleur long métrage au OIAF 2018.
L’histoire
Cette histoire complexe et absurde débute en 1885 lors de la colonisation du Congo par la Belgique. Nous suivons plusieurs personnages à travers cinq cours chapitres. Un roi (inspiré par Léopold II), un jeune esclave africain au grand cœur, un membre de sa famille, Van Holle, un homme d’affaires scrupuleux et Louis, un déserteur de l’armée. Chaque chapitre met l’accent sur un personnage en particulier nous amenant tranquillement vers le prochain.
Critique
Grand gagnant de cette édition, le film de Swaef et Roels est un vrai tour de force désorientant qui malgré sa ligne directrice floue, finit par nous charmer avec un humour noir et une finale des plus déstabilisante. L’animation est raffinée et une attention très particulière est portée aux décors intérieurs et extérieurs. L’atmosphère déconcertante du film présente une violence nous rendant perplexes, voire traumatisés par moments. Ces scènes sont souvent suivies d’événements insensés où l’ont doute de la véracité de ceux-ci. Est-ce que Van Holle a perdu la tête après avoir trop bu ? Louis hallucine-t-il la maison de ses parents cachée sous le gigantesque manoir ? Qui suis-je ? Où suis-je ? Ce film d’environ 45 minutes risque de vous laisser avec une tonne de questions. Donc, je vous suggère fortement d’y aller accompagné au lieu de vous perdre dans les rues d’Ottawa et d’aller à la mauvaise salle pour la prochaine représentation, comme je l’ai fait.
Virus Tropical (3.5/5)
Ce film d’animation colombo équatorien réalisée par Santiago Caicedo est une adaptation du roman graphique de la dessinatrice Powerpaola.
L’histoire
Virus Tropical est une histoire de passage à l’adulte suivant Paola de sa naissance à son adolescence. Vivant avec sa famille constituée d’une mère qui doit tout faire, de deux sœurs et d’un père ancien prêtre qui regrette avoir quitté le clergé, Paola tente de se faire une identité à travers tout ce chaos. Le récit linéaire nous transporte d’endroit en endroit où Paola expérience plusieurs premières fois.
Critique
Le film de 97 minutes, entièrement en noir et blanc, est fondé sur une source autobiographique solide. Sans compter l’excellente introduction où une pluie diluvienne se transforme en spermatozoïde et enfin en Paola, l’animation reste plutôt ordinaire. Par contre, la force de Virus Tropical se situe dans son scénario nostalgique et teinté d’humour. En effet, le film se lit comme un journal intime où les détails les plus gênants de la vie du personnage nous sont dévoilés. Cette stratégie nous invite à nous rapprocher de Paola et des autres personnages féminins, facilitant ainsi notre immersion. Un film facile à apprécier, mais qui parfois souffre de certaines longueurs.